Introduction Livres Nouvelles Plume libre
Quand je pense à mon enfance, la passion qui m’animait alors se réveille, intacte.
La petite fille qui palpite toujours en moi sait bien où se nichent ses premières amours.
Le vieux grenier de la ferme familiale abritait mes lectures. Je m’y cachais des heures durant et lorsque ma mère m’appelait pour le repas, je ne répondais pas. Elle insistait jusqu’à ce qu’à regret je rejoigne la chaleur de la cuisine. Combien de fois n’ai-je pas posé un livre sur mes genoux tandis que, la tête baissée, je faisais mine de me concentrer sur ma soupe.
Dès les bancs de l’école, mes doigts constamment tachés d’encre trahissaient les élans créateurs qui m’envahissaient dès que je me retrouvais seule.
Lorsque les vacances arrivaient, d’aussi loin que je me souvienne, je me refugiais au creux du silence. Dans mon pigeonnier ou dans le fenil je me mettais à genoux devant les mots !
Souvent, j’allais dormir chez ma cousine préférée. Blottie contre elle dans la nuit je lui racontais des histoires que j’inventais au fur et à mesure. Et nous nous endormions ainsi, lovées dans les jardins de mon pays imaginaire.
Un jour, sous de vieux manteaux, dans le grenier de ma mémoire, j’ai retrouvé la petite fille qui revenait chuchoter dans mes rêves. Alors, j’ai ouvert les cachots dans lesquels croupissaient mes héros.
La vie est surprenante. Comme les saisons qui tournent, que ce soit par des sentiers de traverse ou des voies inattendues, elle nous ramène inlassablement à la vérité de notre Etre. Rien n’est figé, tout est possible pour celui qui croit. Je pensais avoir coupé le fil mais tout ce que j’ai écrit : nouvelles, contes, chansons comme les évasions de ma voix dans mes spectacles, mes cours, ce que j’ai créé dans le cadre de mon travail et de mes études prenait sa source là dans cette pluie intérieure où l’eau des rivières se transforme en gouttes de lumière.
Joëlle Dederix